L'exposé d'Etienne Klein a bien mis en situation le traitement du temps et celui de l'irréversibilité des phénomènes physiques par les physiciens depuis Galilée jusqu'à Einstein. Partant de la relativité einsteinienne, je rappellerai dans la première partie de cet exposé quelques traits de la physique contemporaine qu'il faut avoir à l'esprit quand on parle du temps : la nécessité de l'espace-temps, sa structure ; j'utiliserai le voyageur de Langevin pour justifier l'introduction de la gravitation dans la relativité générale ; le contraste entre la loi de l'entropie croissante pour les systèmes isolés et la possibilité de systèmes auto-organisés pour les systèmes ouverts sera rappelé. Dans la seconde partie, l'absence du présent dans la théorie physique est abordée ; j'introduirai la philosophie de la nature d'Alfred North Whitehead, dont le point central concernant le temps est l'inexistence de l'instant. Malgré ses limites, cette philosophie de la nature ouvre des perspectives pour une métaphysique du temps compatible à la fois avec la mécanique quantique et la relativité. Elle a de plus le mérite de proposer une explication du présent et des mécanismes de passage de la potentialité à la réalité concrète. Mots-clés temps ; présent ; instant ; relativité ; mécanique quantique ; Whitehead I INTRODUCTION Arrivé à ce point des conférences « l'ère du temps », mon propos tentera d'élargir notre approche de cette notion, en partant bien sûr du temps des physiciens dont Etienne Klein a abondamment parlé, mais en le replaçant dans un cadre plus général, celui dont nous sommes les témoins, le temps conçu comme la vague qui roule, nous porte et nous emporte, et conditionne l'évolution des choses en nous et autour de nous. Il s'agit pour nous d'essayer d'appréhender la complexité de ce temps réel, qui sans nul doute explique, au moins en partie, pourquoi le physicien par excellence (je veux parler d'Einstein) et le philosophe du temps (Bergson) ont eu tant de mal à se parler, lorsqu'il se sont rencontrés à Paris le 6 avril 1922. Repartons donc du temps des physiciens et de la Relativité, dont les énoncés tellement clairs pour les spécialistes peuvent rester un peu mystérieux pour les citoyens ordinaires.